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Quand, traînant un peu la patte, je m’entretins avec la fameuse Camille R. au sujet de l’hypothétique contenu de mon édito avenir, à la phrase « mais j’ai zéro idéééééeuh », elle répondit « ben si, la dernière fois t’as dit que tu pouvais parler de poulet rôti comme de pourquoi le jazz », donc oui, effectivement, moi le poulet rôti je l’aime gras et régressif, c’est pourquoi je le fourre au préalable d’un bon 70 g de beurre, ainsi que d’un ail épluché, d’un oignon, sel, poivre, bouquet garni, et là, quand il est ainsi lesté, je le malaxe avec de l’huile d’olive et du gros sel. Le jazz par contre je ne l’aime pas trop gras, et régressif encore moins. Pour moi il doit toujours être un peu inconfortable, il doit me gratter un peu, me demander ce que je fais là, ce qui n’est pas du tout le cas du poulet, ah non.

Creuser un sillon avec mes camarades de toujours et quelques nouveaux arrivants, pour se connaître encore et tripoter ensemble cette musique si confidentielle sans laquelle je serais bien malheureuse

Pour qu’il soit bien confortable, le poulet, je mets un peu d’huile d’olive au fond du plat, parce qu’il ne faut pas oublier le gras et que je suis espagnole, et je mets au moins une douzaine d’aux en chemise et quatre ou cinq oignons coupés en quartiers. En revanche, pour le jazz, le malaxage, l’ail, le gros sel et tout, ça oui. Creuser un sillon avec mes camarades de toujours et quelques nouveaux arrivants, pour se connaître encore et tripoter ensemble cette musique si confidentielle sans laquelle je serais bien malheureuse. Un sujet brûlant ? Pas tant, 200 degrés, le four, et surtout on commence par disposer le poulet sur une cuisse pour offrir l’autre aux résistances, quinze minutes. Analogie, quand tu nous tiens. Puis idem pour l’autre. Cuisse. Et là, c’est le moment de boire un coup avant de s’installer, confortablement pour le poulet, inconfortablement pour de la bonne Lo-fi, donc un demi-verre de vin blanc sec, au fond du plat. Ça servira pour arroser. C’est le secret ça d’arroser son poulet. Son jardin. Alors à la fameuse Camille R. qui me disait « par exemple, avec tout ce qui se passe dans le monde, est-ce que c’est bien raisonnable de faire du jazz ? », je lui dirai oui oui c’est vrai, mais quand même j’ai un jardin à arroser et un poulet au four.

Sarah Murcia

© Luc Greliche 

Retrouvez Sarah Murcia à l’occasion de : 
EYEBALING

SAMEDI 18 FÉVRIER / 21H
Ouverture des portes 20h30 / Pannonica