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Le vendredi 9 mai à la salle Paul Fort, le duo 20syl (machines) et Christophe Panzani (flûte traversière, saxophone, clarinette, électronique) a présenté la première de la version live de son projet « Sula Bassana ».

Sula Bassana c’est le nom latin du fou de Bassan, un élégant oiseau marin à l’œil bleu et au crâne jaune. C’est aussi le nom du nouveau projet de 20syl, leader nantais du groupe Hocus Pocus et du Grenoblois Christophe Panzani qui l’avait rejoint au sein du collectif il y a presque vingt ans. Le duo a produit en 2024 un album, dont la superbe pochette renferme une musique soyeuse et ensoleillée, suscitant des critiques élogieuses tant sur la forme que sur le fond.

Si le fou de Bassan est réputé pour son impeccable plastique, sa qualité de fou lui vient de sa spectaculaire technique de pêche, à base de plongeons vertigineux. Connaissant le tempérament scénique des deux oiseaux, on attendait avec curiosité la première de la version live du projet. Sur fond de rap old school, des tee-shirts et des casquettes un peu usées évoquant l’âge d’or des débuts du mouvement hip-hop remplissent progressivement la salle Paul Fort nous rappelant qu’en une quarantaine d’années le mouvement a beaucoup évolué et s’institutionnalise peu à peu.

Les deux musiciens se font face, séparés par une table supportant leurs machines. Leur profil s’encadre dans deux des trois écrans rectangulaires alignés en fond de scène. Les faisceaux mobiles de 6 projecteurs lyre complète une scénographie mêlant jeux de lumière et projection vidéo : simple, sobre, parfaitement maîtrisé et terriblement efficace. Si le disque peut sembler parfois un peu lisse, les morceaux retravaillés pour le live regorgent d’énergie. Mention spéciale pour le travail du son qui, malgré les énormes basses propres au genre, reste clair et parfaitement défini. Les voix de la Chica et Yael Naim qui ensoleillent l’album sont découpées et scratchées par 20syl qui, loin de les « robotiser », n’en garde que la fragilité et les fêlures, donnant au son électronique souvent critiqué pour sa raideur mécanique une touchante humanité. L’électronique jouée en direct permet aux musiciens de larges plages d’improvisations mises à profit par Christophe Panzani pour développer son jeu de sax lyrique et généreux.

Malgré la pression de cette première, la connexion complice des deux musiciens est évidente, même si 20syl, amicalement surnommé cœur de pierre par son comparse plus démonstratif, est plus réservé. Après une heure de cavalcade, on les sent touchés, presque gênés, lorsqu’à la fin du set le public se lève pour une standing ovation. Ils se ressaisiront rapidement pour un rappel improvisé qui conclut un spectacle peaufiné dans ses moindres détails et déjà très mature. Dommage que le pont du 8 mai n’ait pas permis à ce bel oiseau fou la salle comble qu’il méritait mais nul doute que le duo à moitié nantais sera bientôt de retour dans la région: gardez l’œil sur les programmes !

• Nicolas le Grizzly